L’actuel moulin et l’usine hydroélectrique présentent l’intérêt d’être les témoins de deux Révolutions industrielles.
Sur l’emplacement d’un moulin signalé dès le XIIIe siècle, est construite une minoterie. Une minoterie ou meunerie est un grand établissement où se préparent les farines de céréales qui doivent être livrées au commerce. Au XIXe, mais surtout au XXe siècle, les minoteries industrielles ont remplacé les moulins à farine (moulins à eau ou moulins à vent d’autrefois, ou les moulins artisanaux utilisant la force animale).
Le moulin de Bar-Sur-Seine date des années 1860. Un dénommé Charrier en est alors propriétaire. Mais la minoterie cesse toute activité de meunerie vers 1925. C’est l’un des derniers témoins de ces grands moulins de pan de bois que l’on pouvait trouver le long de la Seine et aujourd’hui disparus, la disparition la plus récente étant sans doute celle du moulin de Verrières. Il est l’expression de cette Révolution Industrielle venue, au cours du XIXe siècle et en particulier sous le IIe Empire, moderniser le monde agricole.
Ancien moulin qui enjambe la Seine en centre ville, bâtiment potentiellement magnifique mais qui se délabre honteusement au cœur de la ville faute de décisions concernant sa rénovation.
Le moulin de Bar-sur-Seine est l’un des monuments incontournables de la petite ville. La présence de moulins à cet emplacement est attestée dès le XIe siècle. Que l’on vienne de Troyes, de Dijon ou de Vendeuvre, le moulin s’impose à notre vue, et quelle vue ! A Bar-sur-Seine , c’est un lieu commun que de le qualifier de « verrue » de la ville ; c’est dire que certains préféreraient le voir disparaître, tel une tumeur bénigne de l’épiderme défigurant le plus charmant des visages. Propriété privée, le problème de sa restauration est d’autant plus complexe qu’elle nécessiterait des sommes colossales que ne peut supporter le propriétaire actuel sans l’amortissement d’un tel investissement.
Le moulin date des années 1860. C’est l’un des derniers témoins de ces grands moulins de pan de bois que l’on pouvait trouver le long de la Seine et aujourd’hui disparus, la disparition la plus récente étant sans doute celle du moulin de Verrières. Il est l’expression de cette Révolution Industrielle venue, au cours du XIXe siècle et en particulier sous le IIe Empire, moderniser le monde agricole. C’est une époque où le monde rural entrait dans une période de prospérité, celle qui laissera la nostalgie d’un « bon vieux temps », celle des costumes « folkloriques » dans lesquels on affichait son aisance.
Ce moulin manifeste la concentration de la meunerie en de grandes unités de production, faisant disparaître peu à peu de très nombreux petits moulins devenus non rentables. Parallèlement, la qualité de la farine devait progresser. Le grain subissait de nombreuses opérations de triage et de nettoyage, avant d’être broyé, opérations que ne pouvaient se permettre les petits moulins. Une corde remontait les sacs de grains au dernier étage. Puis, de trémie en trémie, les grains subissaient diverses opérations au fur et à mesure des étages qu’ils descendaient : tamis pour éliminer paille et mottes ; cylindres d’épierrage ; trieurs à graines longues (avoine, orge, seigle) ; trieurs à graines rondes (vesce, nielle, gesse) ; épointeuse ; brosses ; tarare…
L’un des précédents propriétaires avait commencé une rénovation du bâtiment et pendant longtemps un grand échafaudage se hissait le long de la façade. En refaisant la toiture, il avait fait disparaître la rangée de lucarnes du côté du pont. Les travaux ont alors été stoppés et depuis, plus rien n’a été entrepris. Il y a bien quelques projets qui ont vu le jour et dorment encore dans quelques cartons, comme celui de transformer cette partie du moulin en hôtel. Mais les investissements sont très lourds et les risques de ne pas rentabiliser importants.
Loto du patrimoine :
Depuis 2009, Stéphane Prunier, ingénieur de formation, restaure dans l’Aube un immense moulin à pans de bois tout en y produisant de l’électricité. Son projet a été sélectionné par la Mission Stéphane Bern. Sérieux coup de pouce.
Pour le Grand Est, ce sera le moulin de Bar-sur-Seine, le seul représentant du Grand Est
Stéphane Bern, responsable du patrimoine, a dévoilé ce dimanche 10 mars 2019 le nom des 18 premiers monuments sélectionnés pour participer au loto du patrimoine. Ces derniers seront donc sur des tickets à gratter et bénéficieront d’un soutien financier. Au total, treize ont été sélectionnés en métropole et cinq en Outre-Mer.
Comme les autres dossiers sélectionnés, le moulin de Bar-sur-Seine bénéficiera d’un soutien financier, grâce aux jeux Mission Patrimoine de la FDJ : le tirage du Super Loto aura lieu le 14 juillet 2019 et en septembre 2019, en plus des tickets à gratter au prix de 15 euros, des tickets moins chers seront mis en vente au prix de 3 euros.
Plus il y a de joueurs, plus grosse sera la part donnée à chacun des monuments.
L’usine hydroélectrique
La seconde partie de l’ensemble des bâtiments est une centrale hydroélectrique. Les travaux débutèrent en 1923. La production d’électricité commença en novembre 1929. C’est sans doute le premier bâtiment du sud du département à utiliser une structure en béton armé (charpente, piliers, terrasse). Le bâtiment abritait quatre turbines. Elles alimentaient deux alternateurs de 220 et 125 kilowatts-heure et fournissait de l’électricité à EDF. La centrale était couplée avec une autre édifiée à Fouchères, qu’elle commandait à distance. Elles alimentaient en électricité 14 communes de la vallée de la Seine entre Bar-sur-Seine et Bréviandes. Le propriétaire actuel a mis de toutes nouvelles turbines et a relancé la production d’électricité.
Centrale hydroélectrique
Le constructeur était un mauricien, Assan Dina. Il était né à Pamplemousses dans l’île Maurice, le 12 avril 1871. Son grand père, maharaja de Lahore (actuel Pakistan), épousa la comtesse de Germonville. Son père Nourdine, ingénieur du gouvernement des Indes, épousa une française Charlotte Bosselet. Assan Dina devint comme son père ingénieur. Dés ses études terminées, il voyagea : Algérie, Afrique du Sud, Ouganda où il étudie le lac Victoria Nianza, Madagascar et surtout la Chine et l’Himalaya. Il parlait le chinois couramment. Il étudia des projets de routes et de lignes ferroviaires, en particulier en Mandchourie. C’était un scientifique qui, grâce aux profits qu’il comptait tirer des usines hydroélectriques installées en Savoie et dans l’Aube, devait édifier l’Observatoire de Haute-Provence, destiné à faire rattraper à la France son retard dans le domaine de l’astrophysique.
L’Est Républicain et Catherine DAUDENHAN consacrait un article sur le moulin de Bar-Sur-Seine où on pouvait lire ceci : En 2009 donc, Stéphane Prunier, a 35 ans. Ingénieur chez Alsthom puis General Electrique, spécialiste de l’hydraulique, il revient dans le Barséquanais dont il est originaire, s’installe à son compte et, en parallèle, créé la SCI « La Renaissance du moulin ». D’un côté, il y installe quatre nouvelles turbines et relance la production d’électricité – elle est vendue à EdF. De l’autre, il entreprend des travaux d’urgence dans ce moulin de 1000 m2 , sur quatre niveaux, qui enjambe la Seine. « Lorsqu’on a acheté, on était très inquiet. Mais, rassure Stéphane Prunier, après l’expertise technique, on s’est aperçu que le bâtiment était très costaud. Beaucoup de pans de bois étaient détériorés, mais cela n’altère pas le bâtiment. » Mieux, poursuit-il, les courants d’air, en séchant, ont aidé à la conservation.
« J’ai toujours eu un goût pour le patrimoine lié à l’eau, pour les métiers liés à la transformation de l’eau en énergie ». En 2013, Stéphane Prunier a aussi lancé l’association de sauvegarde du patrimoine aubois des moulins et de leurs activités (ASPAMA). Le financement des travaux de réhabilitation du moulin de Bar-sur-Seine par les gains du loto du patrimoine (à 80 % du projet, les 20 % restant étant à la charge du propriétaire) va donner un sérieux coup de pouce au remplissage des pans de bois, à la restauration de la charpente. Entre autres. Au-delà, l’objectif est d’en faire un lieu à vocation culturelle et œnologique.
Des deux témoins de ces Révolutions industrielles, le plus ancien et le plus fragilisé, du fait de son matériau exposé aux intempéries, est très menacé. Mais son sauvetage nécessiterait de gros moyens financiers que le propriétaire ne pourrait seul engager. Sans un sauvetage qui assurerait au moulin une activité rentable, le moulin serait voué à subir le même sort que bon nombre de ses semblables.